Passer

Pilotage de projet : comment développer son flair à risques et dérives ?

Nous connaissons tous un chef de projet qui nous a ébloui par son intuition, son feeling, bref, son flair de fin limier capable d’identifier en un clin d’œil et de gérer efficacement les risques avant même leur apparition.

Nous n’allons pas aborder aujourd’hui la phase de gestion des problèmes, mais celle de leur détection fine.

Si le premier sentiment peut être que cette intuition est un soft skill magique et inné, mon expérience de son développement s’oriente davantage vers la construction très pragmatique, progressive et consciente de ce fameux flair.

Quels outils, trucs et astuces m’ont aidée à développer le petit bout de flair que j’ai à l’heure actuelle ? Enfonçons quelques portes ouvertes… mais aussi, quelques-unes un peu plus closes.

Identifier les parties prenantes

Cette activité tarte à la crème de la gestion de projet peut en fait s’avérer une véritable source d’informations informelles et de signaux faibles.

Car il ne s’agit pas uniquement de lister les parties prenantes principales, mais d’aller chercher plus loin.

Qui peut être impacté de manière indirecte par le projet dans son quotidien ?

Pourquoi le projet a-t-il été créé ? Qui en est à l’origine et quel en est l’élément déclencheur ?

Est-ce que toutes les parties prenantes comprennent la stratégie et la solution choisie ? Avec qui en parlent-ils ?

Au fil du temps, développer l’art de trouver les parties prenantes cachées permet d’aller mettre le doigt au bon endroit et de trouver les bons coins à champignon.

Passer en cuisine

Un plat cogné contre le plan de travail, une cuillère balancée dans un bol, ce sont souvent un signe d’énervement.

De la même manière, il est toujours intéressant de parcourir les bureaux où le projet se réalise. Chaque bruit peut questionner et amener à creuser un nouveau sujet.

De plus en plus de projets se déroulant en distanciel, il m’arrive, lorsque je n’entends pas assez de bruits de cuisine, de provoquer des points informels tournant autour d’un sujet parfois banal du projet et de laisser le temps et l’espace aux discussions informelles. De laisser les équipes bruisser. Voire, de bruisser moi-même en évoquant mes doutes et mes impressions, pour amorcer la discussion.

Prêter attention aux silences

Après avoir évoqué le bruit, évoquons les anges qui passent parfois. Si une cuisine bruyante peut regorger d’informations, une cuisine silencieuse peut parfois être nettement plus inquiétante.

Aller provoquer la parole de ceux qui se taisent est très souvent riche en information. Déployer mes quelques talents d’écoute active et de mise en confiance m’a souvent permis de détecter des risques, qu’ils soient humains ou techniques, ou des besoins de communication inassouvis qui auraient pu mettre en péril l’atteinte des objectifs du projet. 

De surcroît, ces personnes, une fois la porte ouverte, peuvent vous donner les clés pour mieux comprendre les enjeux technique, équipe ou stratégique et développer vos réflexes.

Comprendre les personnalités pour mieux traiter l’information

Le silence de l’un n’est pas le silence d’un autre.

Prendre le temps de comprendre et sentir les personnalités permet de distinguer le bruit de fond des alertes – car tout le monde n’a pas le même niveau de bruits de fond.

De nombreuses méthodes existent pour détecter les types de personnalités à partir des signes extérieurs et communiquer efficacement – ComColors étant ma favorite.

Développer son flair, c’est donc également, pour moi, développer sa capacité à lire les gens rapidement, efficacement et immédiatement et tendre l’oreille au bon moment.

Utiliser intelligemment l’historique personnel et de la société… sans chavirer

L’historique et les retours d’expérience, c’est toujours riche. Personne ne le remet en doute.

L’écueil fréquent est de tomber sur des listes de risques et de précautions à la Prévert, tous plus ou moins tarte à la crème. “Indisponibilité des ressources”, “Défaillance technique”, “Les besoins métiers n’ont pas été bien compris”… Ces risques n’attirent aucun regard et sont généralement laissés, poussiéreux et seuls, au fond d’un tiroir.

Étudier davantage l’historique et les retours permet de rendre les remontées bien plus chirurgicales et surtout, de sentir celles qui sont les plus à même d’impacter le projet.

“Indisponibilité des ressources” devient ainsi “Ressource sollicitée sur des périodes goulot d’étranglement” (par exemple, des ressources finance planifiées en période de clôture annuelle).

“Défaillance technique” est objectivée par “l’identification d’une technologie spécifique qui n’a encore jamais été utilisée dans l’entreprise et qui a peu fait ses preuves”.

“Les besoins métiers n’ont pas été bien compris” se transforment en l’identification d’un “processus récent, qui pose problème aux équipes métiers et/ou pour lequel les experts processus ont quitté la société”.

Utiliser l’historique, ce n’est pas un copié-collé : c’est une porte d’entrée pour une analyse spécifique au projet. Là est tout le feeling.

Traiter les remontées d’alerte avec humilité

Mon flair m’a fait défaut. Je n’ai pas détecté un problème, et une partie prenante me fait comprendre un peu tard que le projet va dans le mur.

Si le premier réflexe, d’ego, peut être de nier la remontée, la traiter avec humilité et en acceptant d’avoir raté une marche est bien plus intéressant pour développer son flair, en réalisant un post-mortem de la situation.

On ne m’y reprendra pas. Une fois, pas deux. Et caetera.

Et vous, quels sont vos tips pour trouver des girolles dans vos projets ?