Vous avez sûrement dû déjà entendre parler des terres rares n’est ce pas ?
Mais savez-vous ce qui se cache derrière ? A quelles fins sont-elles utilisées ? Pourquoi portent-elles le qualificatif “rares” ? C’est à ces questions que nous avons tenté de répondre.
Il s’agira d’abord de définir la notion de terres rares avant de comprendre pourquoi leur exploitation est au cœur de nombreux débats et controverses entre leurs externalités et leur influence sur notre monde numérique.
Les terres rares, qu’est-ce que c’est exactement ?
Les terres rares sont des métaux naturellement présents sur la Terre, que l’on retrouve dans la table de Mendeleïev autrement appelé le tableau périodique des éléments chimiques. Au nombre de 17, certaines sont dispersées en très grandes quantités partout dans le monde, leurs propriétés exceptionnelles les ont rendues incontournables pour la fabrication de bon nombre d’objets technologiques et donc extrêmement prisées.
Pourquoi “rares ” alors ?
La concentration de ces métaux lors de l’extraction de minerais est très faible, on les retrouve généralement sous forme de traces ou en très petites quantités. De plus, ils sont généralement présents sous forme d’alliage dans la croûte terrestre c’est-à-dire qu’il faut les séparer pour pouvoir les utiliser.
Cette activité minière (processus d’extraction et traitements des terres rares) est divisée en trois étapes :
- L’extraction, le plus souvent à ciel ouvert
- Le broyage du minerai en fine poudre
- La séparation des métaux rares du reste du minerai
On comprend ainsi que le qualificatif “rare” vient non pas de sa faible présence sur terre mais plutôt du long processus d’extraction et de raffinage pour les rendre exploitables, qui en plus d’être extrêmement polluantes, s’avèrent être sujets de controverses pour des raisons économiques et sanitaires.
La dépendance économique envers la Chine :
Aujourd’hui, la Chine produit, à elle seule, 71 % des terres rares consommées actuellement et contrôle 41% des ressources naturelles, qui se concentrent dans trois régions du pays. Nous sommes donc dépendants, au moins à court terme, de la volonté chinoise de fournir le monde en terres rares puisque la mise en production d’autres gisements demande un temps long, incompatible avec la réalité économique.
La Chine assoit et entretient ainsi son statut d’oligopole en déplaisent aux autres puissances qui cherchent par conséquent à diversifier leur approvisionnement, ce qui explique la multiplication des projets d’extraction d’une part et des projets de recyclage et retraitement d’autre part. La France, quant à elle, mise sur ces deux solutions pour limiter sa dépendance avec le développement notamment d’une des plus grandes mines européennes de lithium dans le Massif central d’ici 2027.
Les externalités négatives du processus d’extraction des terres rares :
L’exploitation des terres rares, comme beaucoup d’activités anthropologiques, participe à la dégradation de l’environnement. On observe pour chaque tonne d’oxydes de terres rares produite :
– une dégradation des sols exploités avec une production massive de déchets soit 1300 à 1600 m3 de déchets,
– une pollution des eaux de proximité avec la génération de 75m3 d’eaux usées acides et une tonne de résidus radioactifs,
– une libération de gaz nocif suite à l’utilisation d’acide sulfurique dans l’atmosphère entre 9 600 et 12 000m3
La libération de ces déchets ne sont pas sans conséquences pour les travailleurs des mines et les populations riveraines qui sont les premières victimes de cette activité. L’exposition continue aux poussières, l’utilisation quotidienne des eaux devenues polluées sont susceptibles d’entraîner des pathologies irréversibles pour ces deux populations. Elles sont contraintes de quitter leur foyer induit soit par la volonté de développement du parc minier et la nécessité d’une main d’œuvre supplémentaire pour les travailleurs miniers, soit par l’environnement devenu insalubre pour les riverains.
L’obtention d’un produit pur est donc un processus long, gourmand en ressources naturelles et polluants, ayant aussi des impacts sociaux importants.
Par ailleurs, alors que le recyclage pourrait se présenter comme une solution concrète, on se heurte aujourd’hui à des difficultés économiques et de faisabilité. On constate qu’en effet, seulement 1% des terres rares sont recyclées puisqu’il s’avère encore complexe d’isoler les terres rares des autres composants sur les appareils déjà existants. Il y a donc d’importants défis de R&D à relever pour permettre un recyclage économiquement rentable.
Quoiqu’il en soit, l’utilisation raisonnée des terres rares est donc un enjeu majeur à prendre en compte par les entreprises, et souvent oublié lorsqu’elles affichent leur volonté de réduire leur empreinte carbone.
L’omniprésence dans nos quotidiens :
Les terres rares sont au cœur de notre vie, on les retrouve dans les technologies récentes ou « d’avenir » telles que les téléphones, les ordinateurs, les ampoules basses consommation, les véhicules électriques ou encore l’imagerie médicale. Elles rendent également possible la fabrication d’une partie de notre énergie par leur présence dans les rotors d’éoliennes par exemple.
Les terres rares sont ainsi dissimulées derrière beaucoup de nos objets du quotidien. Ces dernières années, le sujet de leur approvisionnement à pris une grande ampleur car elles ont permis de miniaturiser les composants tout en augmentant leur puissance de calcul, ce qui soutient un grand nombre des développements technologiques d’aujourd’hui.
Voici un ordre de grandeur
Ces objets ont transformé nos usages et nos pratiques au cours de ces dernières décennies, on constate par exemple que notre consommation d’équipement augmente de 5% par an et que la production est multipliée par deux tous les 15 ans.
Nous sommes convaincus que les responsabilités sont tant à l’échelle du citoyen qu’à l’échelle des organisations. On constate que les supports numériques se multiplient au sein des foyers avec une hausse (+ 5 points entre 2019 et 2020) du multi-équipement (3) de terminaux d’accès à internet (parmi ordinateur, tablette et smartphone) qui concerne aujourd’hui 73% des Français.
Ces terres rares souffrent d’une surexploitation avec une utilisation dépassant les 130 000 tonnes par an.
Il convient donc d’entamer une démarche de sobriété matérielle pour réussir à s’approvisionner de manière sûre et durable.
Les défis de demain pour nos DSI :
Aujourd’hui, nous assistons à une réelle prise de conscience avec l’arrivée sur le marché des Consom’acteurs : une typologie de clientèle soucieuse et préoccupée par les enjeux environnementaux. En réponse à cette tendance, les entreprises s’adaptent et proposent des solutions concrètes : on a vu émerger ces dernières années sur le marché de multiples calculateurs carbone initiés par des start-ups comme par certains membres des GAFAM.
Après évaluation, il en ressort que la part de fabrication et conception des outils numériques est la plus polluante relativement à l’usage quotidien (en fonction du mix énergétique du pays). En effet, le taux d’équipement des structures et des salariés ne cessent d’évoluer parallèlement à la croissance exponentielle des données quotidiennes à stocker dans les datas centers, qui sont très énergivores.
L’exploitation des terres rares est aujourd’hui une externalité peu prise en compte par les DSI.
Les enjeux environnementaux, encore en phase de maturation, devront être placés à l’avenir au même niveau que les problématiques de sécurité et de l’expérience salariée par les DSI afin d’entrer en conformité avec les ambitions environnementales actuelles.
Les terres rares sont omniprésentes dans notre monde moderne et participent activement au progrès technologique de tous les secteurs d’activité (numérique, transport, énergie). L’accès à ces ressources et plus particulièrement leur maîtrise se présentent comme des enjeux stratégiques majeurs. Il convient donc de trouver un équilibre raisonné tout au long de leur cycle de vie : de leur extraction à leur recyclage sans oublier leur usage.
Les terres rares restent une matière première nécessaire pour les entreprises, et notamment les DSI, qui en ont légitimement besoin pour maintenir leurs activités.